LE GENOGRAMME ou GENOSOCIOGRAMME
OUTIL au service de la PSYCHOGENEALOGIE
IL
est important d’établir une distinction pour trois notions proches (psychogénéalogie,
analyse transgenérationnelle et constellations familiales) liées à la place de
l’individu dans le réseau de ses ancêtres et de sa famille.
Le
principal concept mis en avant par Anne Ancelin Schützenberger, initiatrice de
la psychogénéalogie, est celui de syndrome d'anniversaire. Cette théorie est
basée sur le constat que nous sommes, psychologiquement, la résultante de notre
histoire familiale, sur plusieurs générations. Selon sa théorie, des conflits
non résolus faisant partie de la vie de nos ancêtres, ainsi que les non-dits et
secrets de famille, peuvent rejaillir ou se répéter sur plusieurs décennies à
des dates signifiantes.
« Toute
perte, tout deuil est une souffrance si cruelle, et le travail de deuil est si
long et si douloureux, que l’on recherche de mille façons d’éviter cette
souffrance pour ne pas à avoir à affronter une réalité trop dure presque
invivable. Les maladies organiques graves, qui mettent la vie en danger, ainsi
que les maladies psychosomatiques ou la dépression, sont souvent liées à un
travail de deuil non fait qui taraude la personne ou ses descendants par des
fidélités familiales inconscientes, des liens transgénérationnels, des loyautés
invisibles . Un travail sur la transmission transgénérationnelle de
traumatismes graves permet souvent d’en retrouver l’origine à plusieurs générations. »
Anne
Ancelin Schützenberger
« L’analyse
transgénérationnelle concerne plus particulièrement un travail thérapeutique
d’une durée variable, sur les transmissions transgénérationnelles.(…) Le
processus s’effectue dans le cadre d’un travail thérapeutique suivi et procède
selon des allers retours avec le vécu personnel. Dans ce cadre, il s’agit
autant de démêler l’histoire familiale que de s’intéresser à l’histoire
personnelle « empêchée » par des manques ou des trop plein de transmissions. La
question de sa place est d’importance. C’est à partir de celle-ci que commence
le voyage transgénérationnel et qu’il se termine dans un retour chez soi bien
mérité. »
Maureen
Boireen
« Les
constellations familiales, une méthode qui se réfère au champ systémique des
thérapies familiales ; Il y a autant de façon d’interpréter cette méthode
qu’il y a de constellateurs à la base, il s’agit d’offrir une perspective
spatiale à un problème amené par un individu. la méthode importée d’Allemagne
par Bert Hellinger considère que chaque individu répond, au sein de sa propre
famille, à 3 principes fondamentaux : l’appartenance, l’ordre et l’équilibre
entre donner et recevoir. Si un de ces principes ou plusieurs sont en
dysfonctionnement, le désordre se manifeste et l’individu exprime dans son
corps, dans sa vie, dans ses fonctionnements »
Maureen
Boireen
Extraits
d’un entretien avec le psychiatre et psychanalyste, Serge Tisseron auteur de l'ouvrage "Secrets de
famille".
« Quel
est le ressenti d'un enfant dont le parent est porteur d'un secret douloureux ?
D'abord,
il est soumis aux "suintements" du secret. Par exemple, son parent
fait des crises de tristesse ou de colère imprévisibles et inexplicables.
L'enfant est bouleversé et insécurisé. En même temps, il pressent que son
parent lui cache quelque chose et essaie de l'imaginer. Il développe de la
culpabilité s'il pense être la cause de ces crises, et de la honte s'il suppose
que son parent a commis un acte répréhensible. Parfois, il devient conformiste
pour racheter la faute qu'il imagine. Dans tous les cas, il n'est donc pas
seulement une victime du secret d'un autre ; il prend une part active dans sa
dynamique familiale par l'attitude qu'il développe. Quant à la répétition, elle
est selon moi de l'ordre de l'exception. Quand elle existe, elle est un moyen
de prouver sa loyauté envers le parent. Cela n'a rien à voir avec la fatalité
ni avec une malédiction !
Pour
la troisième génération, le secret est de l'ordre de l'impensable,
dites-vous...
Oui,
le secret qui était indicible pour son porteur, et innommable à la seconde
génération, devient impensable à la troisième. L'enfant n'a aucune raison
d'imaginer qu'il pourrait exister un secret pesant sur lui. Pourtant, il a
grandi en étant marqué par les conséquences sur ses parents du secret de ses
grands-parents. Il peut avoir de la difficulté à aborder ce qui est en lien
avec ce secret, dont pourtant il ignore l'existence. L'angoisse qu'il a
ressentie chez ses parents, et qu'il n'a pu mettre en relation avec rien, peut
aussi l'amener à développer des symptômes sans signification apparente, comme
une toxicomanie ou un trouble somatique. Mais c'est heureusement assez rare.
Auteur
de best-sellers*, Anne Ancelin Schützenberger, cette psychothérapeute de
renommée internationale a fondé la psychogénéalogie.Une discipline qui décrypte
les liens familiaux transgénérationnels.
Extrait
interview du Figaro Magazine
Selon
vous, la plupart des traumatismes qui nous touchent ne sont pas liés à des
événements récents...
Anne
Ancelin Schützenberger - Chacun de nous est inscrit dans une lignée familiale.
Au cours de mon expérience professionnelle, j'ai constaté que nos souffrances
ne datent pas forcément de nos parents mais d'un temps bien plus lointain. Il
faut remonter jusqu'à d'anciens drames pour découvrir le traumatisme initial,
qui se répète souvent de génération en génération.
Le
traumatisme originel est fréquemment lié à des événements historiques
marquants. Par exemple, en France, notre héritage psychologique trouve très
souvent son origine pendant la Seconde Guerre mondiale ou la Révolution et la
Terreur de 1793. Pour filer la métaphore, que l'on soit victime ou agresseur,
d'une famille de «guillotineur» ou de «guillotiné», le choc du sang versé reste
le même. »
« Certains
événements traumatisants ne sont pas «digérés» par ceux qui les vivent.
Parlez-nous de ces deuils non faits...
Toute
famille recèle au moins un cadavre dans le placard parce que, à un moment ou à
un autre, un événement traumatisant a eu lieu. Parfois, ces faits sont à tel
point inacceptables que les parents n'arrivent pas à en faire le deuil ni à les
dire. Or, ce qu'on ignore dans une famille est aussi important que ce que l'on
sait. Ce qu'on n'arrive pas à transmettre en mots se transforme en maux.
Comment
s'effectue cette transmission ?
A
la première génération, c'est un non-dit. A la deuxième, un secret de famille.
A la troisième, cela devient un impensé généalogique : on ne peut même pas
penser les choses mais elles existent dans notre inconscient. Notre
transmission peut se faire par le langage du corps. Si pour un sujet abordé, le
parent arrête subitement de parler, détourne le regard ou fronce le sourcil,
l'enfant va comprendre qu'il existe une zone terrible d'évitement, même s'il ne
sait pas ce qui s'est passé, et la répéter.
J'aime
utiliser une métaphore parlante, celle de la patate chaude: pour se débarrasser
d'un traumatisme trop lourd, certains délèguent ce poids à la génération
suivante, comme on se passe une patate trop chaude de main en main, avec
laquelle chacun se brûle. Il faut essayer de retrouver l'événement, puis en
faire le deuil pour reprendre sa vie à soi.
Pourquoi
répétons-nous les mêmes erreurs que nos ancêtres?
Tant
que le deuil n'est pas fait, il reste une tâche inachevée: nous ressassons
notre passé par loyauté familiale. Dans la Bible même, on parle de ce
phénomène: «Les pères ont mangé des raisins verts, et les dents des enfants en
ont été agacées.» Beaucoup de gens font la même chose que leurs ascendants, ou
le contraire, sans comprendre pourquoi. Il faut réussir à faire ses propres
choix. Il arrive que nous reproduisions les mêmes drames à des périodes
similaires: c'est le syndrome d'anniversaire. Cette date peut être un moment
spécifique, comme les vendanges, une date marquante, comme Noël ou le 14
Juillet, ou encore un âge identique. Mais toutes les répétitions ne sont pas
significatives: les coïncidences existent.
Comment
clore ce deuil?
J'ai
élaboré un outil appelé le génosociogramme. Il s'agit d'un arbre généalogique
agrémenté des liens de couleur positifs et négatifs qui peuvent nous unir avec
les membres de notre famille. On y note les événements importants: perte d'un
enfant mais aussi d'une demeure ou d'un animal, accident, déracinement,
changement de vie, réussite professionnelle exceptionnelle. En observant le
génosociogramme, on peut voir en un coup d'œil l'histoire familiale. Avoir sous
les yeux cette image frontale provoque un choc émotionnel libératoire. On peut
clore ces deuils de maintes façons. J'ai connu une femme qui a fait brûler son
génosociogramme, puis l'a enterré dans son jardin !
* À
LIRE : Aïe, mes aïeux ! , Desclée de Brouwer (2009),et Psychogénéalogie, Payot
(2007).
QUELQUES DEFINITIONS DE L’EGOGRAMME
"A
son origine, le génogramme est un outil thérapeutique. Il a été créé par le
courant des thérapies familiales systémiques aux États-Unis, dans les années
1970. Selon les systémiciens américains, l'invention du génogramme est associée
aux travaux de M. Bowen et à sa théorie des systèmes familiaux (...) L’outil a
été introduit en France, par deux articles de E. Lemaire-Arnaud, le premier en
1980 et le second en 1985.
L'évaluation
en protection de l'enfance
Théorie
et méthode
Francis
Alföldi
Dunod,
1999
"
Un génogramme est une technique pour dessiner un arbre familial et y
enregistrer de l'information sur les membres de la famille et leurs relations
sur une période d'au moins trois générations. Les génogrammes traduisent
graphiquement de l'information sur la famille d'une façon telle qu'ils
fournissent une vue d'ensemble rapide de " patterns " familiaux
complexes et sont une source riche d'hypothèses sur la manière dont un problème
clinique peut-être relié à un contexte familial donné et l'évaluation dans le
temps, à la fois du problème et du contexte ".
"Rappelons
que le génosociogramme est une sorte d'arbre généalogique fait de mémoire (c'est
à dire sans recherche d'information et de documents) complété des événements de
vie importants (avec leurs dates et leurs liens) et du contexte affectif (liens
sociométriques, marqués par des flèches ou des traits de couleurs). Le
génosociogramme n'est pas seulement un arbre généalogique situant la parentèle.
Ce qui est important, c'est la façon dont l'auteur de cet arbre
"fantasmatique" perçoit les personnages et les liens qui les unissent
et qui le lient à ses ascendants et collatéraux et à leurs rôles. Ce sont même
parfois les blancs, les trous de mémoire de la famille qui en disent long
(comme les silences sur le divan) sur ce qui a été "rayé de la mémoire
familiale"."
Aïe,
mes aïeux,
Anne
Ancelin Schützenberger
Desclée
de Brouwer 1999
"Le
génogramme met en évidence les évènements répétitifs, les maladies, accidents,
les conflits relationnels, les différences culturelles, sociales, les
programmations conscientes et inconscientes sources d’obstacles à la
réalisation personnelle."